La vie est parfois faite d’étonnantes rencontres. Ces rencontres menant sur un nouveau chemin ont le fabuleux pouvoir de changer une vie, de la nourrir d’une passion révélatrice de talents et de nouveaux horizons. C’est l’histoire de Maxime Matray, réalisateur et professeur de design graphique à l’École Supérieure d’Arts Plastiques - Pavillon Bosio.
Un matin de décembre, au Pavillon Bosio, le sourire discret de Maxime Matray nous accueille sur le pas de la porte de l’école. Nous nous attendons à rencontrer un passionné de cinéma depuis toujours. Nous rencontrons un passionné tout court que la vie a mené sur le chemin du 7e art, un peu par hasard. Cette rencontre eut lieu quelques années auparavant lorsqu’il découvrit Alexia Walther, diplômée de l’École Supérieure d’Art Visuel de Genève. Depuis, ils ne se sont plus quittés et de ce fabuleux binôme émerge un talent cinématographique hors pair et plusieurs fois primé.
« Une chose importante : nous travaillons à deux. Nous venons tous les deux des arts plastiques. Nos spécialités se complètent et se nourrissent » débute Maxime Matray. Après des études à la Villa Arson à Nice, Maxime fait ses débuts artistiques dans la photographie et le design graphique « J’avais toujours eu envie de faire les Beaux-arts. C’était comme un hub. J’avais ce sentiment qu’à partir de là, que l’on pouvait tout faire. Les Beaux-arts encouragent le dialogue, l’expérimentation et la curiosité, trois qualités qui aident ensuite à se débrouiller dans la vie ! » ajoute-t-il amusé. « Nos premières passions artistiques avec Alexia, la photo, la video et l’art graphique, étaient un peu comme si nous voulions faire du cinéma sans se l’avouer, ou peut-être sans l’oser » précise-t-il.
En 2006, Alexia Walther réalise un court métrage pour une exposition dont Maxime signe la musique. Ce court métrage, Twist, alors primé au Festival Entrevues de Belfort, lance la fabuleuse aventure cinématographique de ce duo inspiré. Suivront L’Élan et L’Été (2008), Les Ambassadeurs (2012), Malfaisant (2013) pour aboutir à leur premier long métrage en 2018 : Bêtes Blondes. Ce premier long métrage fut doublement primé, en septembre dernier à la Mostra de Venise, puis en novembre, exactement 12 ans après leur premier court métrage, au prestigieux Festival de Belfort, remportant le Prix du meilleur film français. La boucle est bouclée.
Si Alexia a une vision d’ensemble, Maxime, lui, a le sens du détail. Sur cet équilibre subtil repose le secret de belles réalisations. « Lorsque nous écrivons, nous discutons beaucoup. Nous sommes complémentaires sur beaucoup de points. Alexia s’attache à l’empreinte du film sur le spectateur tandis que je suis plus sensible aux détails et à la musique. Avec toujours ce point commun qui nous lie : puiser nos inspirations dans la pratique des arts plastiques. Nous continuons toujours à penser comme des plasticiens », indique Maxime.
Pour Maxime, le cinéma est une oeuvre fascinante qui se construit et se déconstruit à chacune de ses étapes. « Déjà avec le casting, beaucoup de choses changent », précise-t-il pour ajouter « On va s’adapter au comédien et à sa personnalité. Certaines séquences sont parfois réécrites. Il ne faut pas être trop attaché à l’objet littéraire que le scénario constitue au départ car il est amené à beaucoup bouger au cours du tournage ».
À la question « quelle rencontre artistique vous a particulièrement marqué ? », Maxime rêve un instant et l’on devine qu’au premier rang se trouve Alexia. Mais avec pudeur, Maxime nous répond : « Même si nous avons des pratiques et des idées sur l’art complètement différentes, je crois que ma rencontre avec Ben Vautier, alors que j’étais étudiant, et l’amitié que nous avons gardée depuis, comptent beaucoup pour moi. C’est un artiste vraiment singulier, à la fois anarchique et exigeant, qui m’a appris pas mal de choses. Et c’est aussi, humainement parlant, un grand homme. »
Aujourd’hui, il partage son temps entre l’écriture, toujours à quatre mains, du scénario de son prochain film et l’enseignement du design graphique à l’École Supérieure d’Arts Plastiques de Monaco - Pavillon Bosio. « L’enseignement est une aventure artistique fabuleuse. Elle permet d’exprimer ce que l’on a du mal à mettre en mots lors du travail un peu solitaire de l’artiste dans son atelier. Elle oblige à formuler les choses. Elle permet aussi de guider et d’orienter l’autre pour l’aider à trouver son chemin ». Depuis cinq ans, le réalisateur azuréen propose également à ses étudiants des workshops pour une immersion d’une semaine dans le monde cinématographique.
Produit par Emmanuel Chaumet qui soutient leur travail depuis près de quatre ans, le dernier film, Bêtes Blondes sortira dans les salles en 2019. Cet évènement marquera sans nul doute la carrière, et la vie de ce duo de passionnés. Étonnamment ou pas, Bêtes Blondes s’inspire d’un rêve, lui-même nourri d’un collage de plusieurs rêves assemblés des deux scénaristes. Sur grand écran, le film s’anime ainsi à la manière d’un songe et nous invite à partager l’univers coloré, un peu secret de Maxime et Alexia.
Rendez-vous donc l’an prochain dans les salles !