Les Olympiades Féminines de Monaco
#71 - Novembre 21 / Janvier 22 - Patrimoine

Les Olympiades Féminines de Monaco

Nous sommes en 1921. Pour la première fois de son histoire, la Principauté accueille les Olympiades Féminines. Un évènement précurseur qui témoigne de la modernité de Monaco, mais aussi de son soutien indéfectible au développement du sport et à l’émancipation de la femme. Découverte. 

La compétition sportive féminine, une évidence pas si simple en 1921… 

En 1917, la Fédération des sociétés françaises de sport féminin (FSFSF) est créée et assoit sa popularité au fil des années… En 1920, les premières compétitions féminines ont lieu en France avec le championnat d’athlétisme, puis avec un premier échange international avec l’Angleterre autour de quatre matchs de football. Alice Milliat (sportive pratiquant l'aviron à haut niveau, la natation et le hockey sur gazon) est l’une des grandes ambassadrices qui œuvre pour l’accession des femmes aux grandes compétitions sportives internationales. En 1919, elle prend la présidence de la FSFSF mais se heurte au caractère très conservateur de l’IAAF et du Comité International Olympique (CIO). Le soutien viendra de la Principauté… et notamment de l’une de ses personnalités les plus influentes.

L’organisation du « premier meeting international d’éducation physique féminine et de sports féminins » à Monaco

S’inscrivant dans les idées progressistes du Prince Albert Ier, Camille Blanc, président de la Société des Bains de Mer et de l’International Sporting Club de Monaco, apporte un soutien important à la cause du sport féminin. Depuis le début du siècle, la Principauté s’affirme comme l’une des places de choix où se jouent de grandes compétitions sportives : tir aux pigeons, tournois de lawn-tennis, courses de canots… Précurseur et souhaitant attirer des spectateurs toujours plus prestigieux pour les charmantes saisons d’hiver en Principauté, Camille Blanc est séduit par l’originalité et la modernité d’une compétition sportive féminine. L’International Sporting Club de Monaco assume alors son organisation et en fixe la date : 
du 23 au 31 mars 1921. 

Camille Blanc peut compter sur le soutien de la presse sportive avec laquelle il entretient de parfaites relations. Deux journalistes de l’Écho des Sports, Robert Coquelle et Marcel Delarbre, seront respectivement commissaire général et directeur technique de l’évènement. Si la FSFSF n’apparaît pas parmi les membres organisateurs, elle participe au comité de parrainage et ses principaux cadres sont présents pour accompagner les 45 jeunes femmes sélectionnées par la fédération française. 

« le Mont Olympe est transféré sur la Côte d’Azur »

Pour accueillir les différentes épreuves, le tir aux pigeons sera « miraculeusement transformé en mini stade ». Le nombre de participantes est estimé entre 100 et 300 jeunes filles provenant de cinq pays : l’Angleterre, la France, l’Italie, la Norvège et la Suisse. Le programme est tout aussi éclectique et reste fidèle à la description que fera Marcel Delarbre de cet évènement : « Olympiade de la Grâce ». Aux sports traditionnels comme les compétitions d’athlétisme, tournois de basket, démonstrations de hockey et de pushball, s’ajoutent démonstrations de danse et de gymnastique rythmique. À l’image des prestigieux évènements sportifs organisés en Principauté, concerts, dîners de prestige, banquet final et distribution des prix au cœur de l’Hôtel de Paris viennent agrémenter ces spectacles sportifs de la journée. À la tribune d’honneur, on y retrouve chaque jour des personnalités remarquables en villégiature d’hiver en Principauté ou venues tout spécialement pour cette occasion inédite.

Un palmarès à la hauteur de l’évènement

 

Les résultats ne peuvent à la fois que « flatter le sentiment national et en même temps, rassurer sur la vitalité du sport féminin puisque les femmes sportives françaises ont réussi, plus tôt que les hommes, à rivaliser avec les championnes étrangères et à les vaincre ». Parmi elles, de grandes athlètes comme Lucie Bréard qui se distingue au 800 m, Germaine Delapierre ou encore la « scandaleuse » Violette Gouraud-Morris. L’anglaise Mary Lines s’est quant à elle, très largement faite remarquer sur les courses de vitesse. Tous s’accordent alors pour saluer la réussite de ce premier meeting sur lequel beaucoup d’espoir était fondé avec « une foule énorme, réservée d’abord, puis unanimement enthousiaste ». 

Les éditions suivantes, preuves d’un succès ! 

La seconde édition doit finir de charmer, tout au moins persuader les derniers réfractaires au sport féminin. Comme l’indique la presse, pour cette seconde édition qui se déroule du 14 au 24 avril 1922, Camille Blanc « a tenu à ce que cette année, de véritables jeux olympiques féminins renversent les dernières barrières, balayent les dernières oppositions que le passé aux étroites conceptions sexuelles dressait contre ce mouvement de renaissance féminine ».

Preuve du véritable succès et de la légitimité de ces olympiades, le nombre de participantes de cette seconde rencontre est estimé entre 300 et 700 et de nouveaux pays y sont représentés : la Belgique, la « Tcheco-Slovaquie » et la Suède, qui est venue remplacer la Norvège. La durée de l’évènement double presque et le programme sportif s’étoffe. Les épreuves d’athlétisme se sont enrichies d’un pentathlon et la natation a fait son apparition avec des épreuves dans le Port de Monaco. Le troisième et dernier meeting de Monte-Carlo en 1923 « se distingue des précédents par une dimension compétitive beaucoup plus affirmée ». 

Aujourd’hui, la promenade qui surplombe la terrasse composée par Vasarely porte encore le souvenir de ces compétitions féminines qui ont marqué l’histoire du sport. Sur sa plaque commémorative, on peut y lire que « sur ces lieux se déroulèrent en 1921, 1922, 1923 les « Olympiades féminines », première étape de l’accès des femmes aux Jeux Olympiques »

Références bibliographiques

  • Bernard Maccario, « Olympiades féminines » de Monte Carlo, publié dans la Gazette Coubertin, 1er semestre 2020, n°60-61, pp. 20-24.
  • Programme du 1er Meeting International d’Education Physique Féminine et de Sports
  • La Vie au Grand Air

Cet article a été écrit en collaboration avec Dominique Bon, Responsable du Fonds Régional de la Médiathèque de Monaco et avec la participation de Bernard Maccario.

 

Les Olympiades Féminines de Monaco

Olympiades féminines, 1921, Mary Lines, Tir aux pigeons
Les Olympiades Féminines de Monaco

Olympiades féminines, 1921, Tir aux pigeons
Les Olympiades Féminines de Monaco

Olympiades féminines, 1922, Tir aux pigeons
Les Olympiades Féminines de Monaco

Olympiades féminines, 1922, Tir aux pigeons
Les Olympiades Féminines de Monaco

Olympiades féminines, 1922, Tir aux pigeons
Les Olympiades Féminines de Monaco

Olympiades féminines, 1923, Fontvieille
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1er meeting International d'Education Physique Féminine et de Sports
Les Olympiades Féminines de Monaco

Olympiades féminines, 1922, Tir aux pigeons

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