Selon l’UNESCO, « Le patrimoine est l’héritage du passé dont nous profitons aujourd’hui et que nous transmettons aux générations à venir ». Il y a ainsi ceux qui transmettent le Patrimoine, et il y a ceux qui le font vivre et le préservent, puis ceux qui participent à l’enrichir par leurs œuvres et leurs créations. Ce beau dialogue entre Patrimoine et Éducation s’est ouvert en Principauté avec la naissance de deux institutions des lettres et des arts sous le règne du Prince Albert Ier : la Bibliothèque Communale et l’École de Dessin. Découverte.
Le savoir en partage : la naissance de la Bibliothèque Communale
Sensible à l’émancipation culturelle grâce à la démocratisation du savoir, le Prince Albert Ier souhaite créer un lieu « consacré à l’étude et à la découverte » et que « chacun aura à cœur d’enrichir(…) ». Le 25 janvier 1909, par Ordonnance Souveraine, ce projet se concrétise et « il est crée en Principauté une Bibliothèque Communale »(1).La première bibliothèque est ainsi inaugurée le 2 avril 1909 au 32 rue Grimaldi à la Maison Marquet.Elle y restera jusqu’à son transfert boulevard de la Condamine (aujourd’hui boulevard Albert 1er) en 1919. Présidé par le Maire Emile de Loth, un comité de 11 membres nommés pour trois ans est chargé de son administration. Son premier conservateur est Gaston d’Adhémar de Lantagnac, mais très rapidement, dès 1911, Louis Bellando de Castro lui succèdera et marquera particulièrement les premières années de cette grande institution culturelle.
À l’ouverture de la bibliothèque, Léon-Honoré Labande, Conservateur des Archives du Palais, est chargé d’organiser la substantifique moelle de ce nouveau lieu d’érudition. Les premiers ouvrages proviennent des Archives du Palais, et d’autres sont achetés. Le conservateur sélectionne plus de 7000 ouvrages qui dévoilent les plus belles histoires de la littérature française, d’autres ouvrages sont plus scientifiques, historiques ou géographiques…
Aujourd’hui entièrement interactifs et numériques, les premiers catalogues sommaire des livres de la Bibliothèque Communale étaient manuscrits. Le premier catalogue datant de 1910 décline le nom des plus grands écrivains, essayistes, philosophes et poètes et est aujourd’hui préservé au Fonds Patrimonial.
D’hier à aujourd’hui, la Médiathèque de Monaco
En 1980, la Bibliothèque Communale est baptisée « Louis Notari » à l’occasion du centenaire du poète monégasque. Au fil des siècles, ce lieu de partage, d’échanges et de découverte a su enrichir son offre s’adaptant aux évolutions de son temps. Développant la Sonothèque, la Vidéothèque, le Fonds Régional puis le secteur jeunesse en 2019, la Médiathèque de Monaco offre plus de 350 000 documents, 350 titres de périodiques papier, 1200 titres de périodiques numériques ainsi que des milliers de documents d’archives…
Fière de son passé et tournée vers l’avenir, la future Médiathèque de Monaco, qui verra le jour à l’horizon 2023 au sein de l’Ilot Pasteur, continuera à être un lieu de culture, de connaissance et de découverte.
L’enseignement des arts : la naissance d’une école de dessin
À la même période, l’idée d’un lieu de formation artistique à Monaco naît du génie d’un philanthrope italien, désireux d’initier gratuitement les jeunes gens aux arts graphiques. Né le 15 avril 1869 à Milan, Giunio Colombo s’illustrera en Principauté par ses plus belles aquarelles mais aussi par ses cours de dessin particulièrement appréciés. Son temps, il le partage entre son art, ses participations régulières dès 1899 aux Expositions Internationales des Beaux-Arts à Monaco et à la création de son école. C’est au 25 boulevard de la Condamine, qu’il dispense ses premiers « cours gratuits de dessin »(2) pour les enfants natifs de Monaco de plus de 13 ans. Face à son succès, il sera ensuite autorisé à « installer provisoirement un cours de dessin et de peinture dans deux pièces vacantes de l’appartement du service téléphonique, rue Caroline » dès décembre 1900(3). Ainsi, ce jour de Noël 1900 débute l’histoire de la première école de dessin de la Principauté, dans des locaux modestes, mais où la passion et le talent de l’artiste font le ravissement des élèves et de leurs parents.
À partir de 1902, l’enseignement s’organise et « est réparti en trois cours : préparatoire, supérieur et spécial »(4). L’école acquiert une belle notoriété « obtenue jusqu’à ce jour par cette si utile fondation et l’appui des hautes protections qui ne lui ont jamais fait défaut ». Elle sera, deux ans plus tard, invitée à déménager « par autorisation gracieuse de S.A.S. le Prince dans un corps de bâtiment de l’ancien Hôtel-Dieu de Monaco »(5).
Au fil des années, l’école s’enrichit de nouvelles disciplines devenant « l’École gratuite de Dessin Artistique et Industriel de Monaco » et le nombre d’élèves ne cesse d’augmenter. En 1907, ils étaient déjà 72(6), et l’année suivante plus de 85. Dans les journaux d’époque, on y découvre la vie de l’école et ses évolutions comme l’apparition en 1908 d’un cours de poterie « grâce au professeur Baudin » qui permettra aux élèves de découvrir de nouvelles applications industrielles(7).
Colombo, désormais « professeur-directeur de l’École gratuite de Dessin Artistique et Industriel », forme artistes mais aussi architectes. Reconnu pour sa pédagogie et sa rigueur, le professeur est également chargé des cours de dessin dans les écoles de la Principauté(8).
Moments marquants : les remises de prix annuelles et les évènements de l’association des anciens élèves
« Réunis par l’Amour de l’art »(9), élèves, parents, professeurs et officiels répondent nombreux chaque année à l’invitation pour la remise des prix de l’école de dessin qui devient une tradition à Monaco. Le 10 mai 1929, le journal Rives d’Azur illustre la renommée de ce rendez-vous incontournable : « Au milieu d’une grande affluence de notabilités, de parents et d’amis des élèves de l’École de Dessin Artistique et Industriel de la Principauté (…) a eu lieu dans les locaux de cette Institution, à Monaco-Ville, la distribution solennelle des prix ».
Peu à peu l’école de dessin assoit sa notoriété dans la région et formera de grands artistes. À l’instar des grandes écoles, celle du Rocher fonde aussi son Association d’anciens élèves autour de l’année 1926. La première Exposition de l’Association est placée sous le Haut Patronage du Prince Louis II, de la Princesse Charlotte et du Prince Pierre. Sur les murs immaculés des locaux de l’école, Place de la Visitation, les œuvres exposées étaient à l’image de la qualité de l’enseignement où ses anciens élèves étaient devenus les plus grands peintres de Monaco : « Girard, Ciampi, Mathis, E. Clérissi, Ravarino, R. Chiavassa, L. Parodi, H. Labella, Molinario. E. Bellini, F. Agliardi, D. Verrando, M. Momège, Giangiacomi et C. Ballério ».(10)
Devenue en 2004 l’École Supérieure d’Arts Plastiques de la Ville de Monaco - Pavillon Bosio, elle perpétue aujourd’hui l’héritage des premiers cours de dessins en Principauté autour d’une formation polyvalente en art et en scénographie qui fait d’elle une référence dans le milieu artistique
(1) Ordonnance Souveraine signée par le Prince Albert 1er, 25 janvier 1909 / (2) Petit Monégasque, 1899 / (3) Colombo, cours de dessin provisoire rue Caroline, Petit Monégasque, 25 décembre 1900 / (4) Petit monégasque, 16 octobre 1902 / (5) Journal de Monaco, 8 décembre 1903 / (6) Journal de Monaco, 21 mai 1907 / (7) Journal de Monaco, 7 juillet 1908 / (8) Journal de Monaco, 13 juillet 1909 / (9) Discours de Colombo, Journal de Monaco, 25 juillet 1911 / (10) Journal de Monaco, 22 avril 1926.
Le Prince Souverain Albert II a souhaité célébrer les 100 ans de la disparition de son trisaïeul. Pour ce faire il a nommé le Comité de commémoration Albert Ier - 2022. La Médiathèque fait partie du comité exécutif chargé de coordonner les célébrations.
Le magazine Monaco Vivre Ma Ville mettra particulièrement en valeur jusqu’en 2022 l’œuvre du Prince Albert Ier à travers les fondations municipales qu’il a ordonnées ou soutenues sous son règne.